La situation s'aggrave au Mali et en Afrique de l’Ouest | Développement et Paix

La situation s'aggrave au Mali et en Afrique de l’Ouest

5 avril 2012
par 
Par Guy Des Aulniers, chargé de programme pour les secours d’urgence

Au Mali, depuis janvier, plus de 200 000 personnes ont quitté leur domicile, fuyant pour la plupart l’offensive des rebelles. Sur ce nombre, 107 000 personnes ont cherché refuge ailleurs au pays. Les autres ont fui à l’étranger, en Mauritanie, au Niger, au Burkina Faso et en Algérie.

Dans la capitale Bamako, la situation est calme, mais la population souffre de l’embargo total imposé par les pays de la région qui réclament le départ de la junte militaire au pouvoir et le retour de l’ordre constitutionnel.

Depuis le coup d’état du 21 mars dernier, la situation se dégrade sérieusement dans le pays. 4 groupes rebelles se disputent le contrôle du nord malien : le Mouvement national de libération du Azawad (MLNA), un mouvement séparatiste qui réclame une partie du territoire du nord du pays ; Al Quäïda au Maghreb islamique (AQMI) ; le mouvement Ançar Dine (armée de l’AQMI) qui affiche sa volonté d’instituer la charia sur tout le territoire et un nouveau groupe islamiste, le Mouvement pour l’unicité et le Djihab en Afrique de l’Ouest (MUJAO). L’élément déclencheur des troubles a été le retour des ex-combattants maliens lourdement armés de Lybie où ils avaient combattu pour défendre l’ancien régime de Mouammar Khadafi.

Des tensions importantes règnent donc entre ces groupes et le conflit prend maintenant une coloration religieuse. « Samedi soir, nous avons réussi à fuir la ville de Gao après avoir appris que certains groupes rebelles islamistes cherchaient à tuer les prêtres et les religieux. Samedi après-midi, les rebelles ont été repoussés de la ville avant de se regrouper et de finalement s’emparer de Gao abandonnée par les forces armées. Nous avons été prévenus ce matin par notre gardien que la mission et l’église ont été détruites. Nous avons également reçu des appels de chrétiens restés à Gao qui nous disent qu’ils se cachent et craignent pour leur vie. Environ 200 chrétiens sont toujours dans la ville », raconte le père Jean-Jacques, responsable du comité de Caritas Gao dans un communiqué de Caritas Internationalis. La charia aurait par ailleurs été appliquée à Tombouctou où des voleurs auraient été tués sur le coup sans autre forme de procès.

Tout cela dans le contexte où plus de 12 millions de personnes sont en danger de manquer de nourriture dans la région du Sahel. Au Mali seulement, 3 575 160 personnes sur une population de 16 000 000  sont touchées par cette crise.

Dans son message pascal, le président de Caritas Internationalis, le cardinal Oscar Rodriguez Maradiaga, nous rappelle pertinemment que : « La faim qui se propage au Tchad, au Niger, au Mali, au Burkina Faso, au Sénégal et en Mauritanie est due en partie à la sécheresse et aux insectes nuisibles. Mais la crise est également provoquée par l’homme : notre système alimentaire mondial favorise les grandes multinationales et affaiblit le petit agriculteur. La vérité, c’est que nous savions depuis des mois qu’une crise alimentaire était imminente en Afrique occidentale. Le pape Benoît a mis en garde en février : « Le Sahel sera à nouveau sérieusement menacé ces prochains mois par une baisse notable de ses ressources alimentaires. » Les membres du personnel Caritas et les personnes qu’on aide ont tiré la sonnette d’alarme. Certaines communautés disent même qu’elles n’ont jamais vu une situation aussi grave. Caritas a lancé des appels d’urgence pour fournir une aide alimentaire ainsi que sous d’autres formes à plus de 650 000 personnes. Mais la communauté internationale n’a pas agi. Ces pays du Sahel ont toujours moins de 50 % de l’aide dont ils ont besoin. Nous savons qu’en agissant tôt et rapidement, nous pouvons épargner des souffrances humaines et économiser de l’argent. Le Niger a déjà été confronté à des urgences alimentaires en 2005 et 2010. Le coût pour éviter une crise de la faim au Niger en 2005 était estimé à 7 $ par personne. Le monde n’a pas agi. Répondre à la crise généralisée a coûté 23 $ par personne. »

Le 24 février dernier, Développement et Paix lançait un appel aux dons afin de permettre aux canadiens de contribuer à cette grave crise humanitaire.