S’il y a un message que Mgr Eugenio Rixen souhaite partager avec les gens d’ici au cours de sa visite de solidarité au Canada, c’est que la foi et l’action ne sont pas en opposition, mais vont plutôt de pair. Mgr Rixen fait actuellement une tournée en Alberta et au Manitoba dans le cadre de la campagne Carême de partage de Développement et Paix, sur le thème Parce qu’on sème, on donne.
Originaire de Belgique, Mgr Rixen a vécu sa foi dans l’action durant les 35 années qu’il a passées au Brésil. Il est évêque du diocèse de Goiás, où Développement et Paix travaille en étroite collaboration avec la Commission pastorale de la terre (CPT) sur les enjeux liés à la terre et à l’agriculture.
« Goiás est très affecté par les luttes territoriales, explique Mgr Rixen. Il y règne de grandes tensions entre l’agriculture familiale, qui est destinée à nourrir les familles, et l’agrobusiness, où les cultures sont purement destinées à l’exportation. »
La CPT s’efforce de défendre l’agriculture familiale et de faire en sorte qu’elle puisse prospérer. Elle le fait de trois façons :
1. En aidant les petits agriculteurs familiaux à avoir accès à la terre à travers un programme gouvernemental de réforme agraire.
2. En offrant un appui technique afin que les familles puissent produire de la nourriture qu’elles peuvent aussi vendre au marché.
3. En regroupant les gens en coopératives et associations, qui peuvent les aider dans la vente de leurs produits et l’accès aux services et subventions de l’État.
Mgr Rixen a constaté à quel point les choses sont difficiles au Brésil pour les plus pauvres et les plus vulnérables qui se heurtent à des structures inéquitables qui les empêchent d’avoir accès à la terre. Même le programme de réforme agraire du gouvernement est un processus long et fastidieux.
Le but de cette réforme agraire est de permettre au gouvernement d’acquérir de grandes étendues de terres qui sont laissées à l’abandon par des propriétaires fonciers absents ou qui servent à la culture de drogues illégales, et de les redistribuer aux petits agriculteurs familiaux. Jusqu’à 45 familles peuvent bénéficier d’une parcelle de terre, mais c’est un processus qui peut prendre des années et qui exige une somme considérable de détermination et de persévérance.
« Lorsque les gens apprennent qu’une parcelle de terre sera bientôt disponible, ils se réunissent et campent sur le site, dit-il. Souvent, ils doivent rester sur la terre de 5 à 7 ans avant que le gouvernement leur accorde une parcelle. Ce sont des agriculteurs qui ont toujours eu à travailler pour les autres, souvent dans des conditions proches de l’esclavage, et qui n’ont jamais eu droit à la terre. Ils sont pris dans cette lutte qui leur apporte d’immenses souffrances pendant de longues années, pour pouvoir avoir des terres à laisser à leurs enfants. »
Le rôle de l’Église locale est d’aider les gens à s’organiser et d’agir en tant qu’intermédiaire dans les négociations avec le gouvernement.
Par son travail, Mgr Rixen a pu constater que les femmes, le plus souvent, sont le fer de lance de ces luttes.
« Les femmes jouent un rôle indispensable dans ce travail. Elles sont très courageuses et elles font montre d’une endurance et d’une résistance formidables. Leur lien avec la terre et avec la vie est tellement fort », conclut-il.
Durant les nombreuses années qu’il a passées au Brésil, Mgr Rixen estime que le pays a fait des progrès quant à la réduction de la pauvreté; toutefois, il remarque aujourd’hui que, comme société, le Brésil se dirige de plus en plus vers la concentration de la richesse, avec la conséquence que de plus en plus de personnes sont marginalisées.
Il déclare que les organisations locales qui travaillent pour contrer ces tendances ne pourraient pas survivre sans la solidarité des Canadiens et Canadiennes grâce à Développement et Paix.
« Tout ce qui renforce la solidarité nord-sud est très important et très intéressant, parce que cela fonctionne dans les deux sens : nous apprenons les uns des autres. »
Mgr Rixen espère partager avec les Canadiens et Canadiennes son expérience que la foi peut et doit être une question d’engagement social plutôt que de se borner seulement à la prière. Il cite un Canadien comme une de ses plus grandes sources d’inspiration : Jean Vanier, le fondateur de l’organisation L’Arche.
« Il a démontré un engagement radical. Nous devons soutenir tout ce qui est favorable à la vie et à la lutte pour la population. Nous croyons qu’un autre monde est possible. »