Le Cambodge a été marqué ces dernières semaines par des violences à répétition. En proie à une grave crise politique, le climat social du pays se détériore et ces derniers jours en particulier, une répression de l’armée a entrainé la mort de manifestants pacifiques. Développement et Paix ainsi que plusieurs organisations cambodgiennes dont ses partenaires, la Ligue Cambodgienne pour la promotion et la défense des droits de l’Homme (LICADHO) et NGO Forum on Cambodia, condamnent le recours à la force meurtrière par les autorités cambodgiennes contre les ouvriers du textile en grève.
En grève depuis la fin décembre, près de trente mille ouvriers du textile à Phnom Penh réclament une augmentation de salaire, afin que celui-ci passe de 80 à 160 dollars. Le Ministère cambodgien du Travail a annoncé qu’il serait augmenté à 100 dollars par mois en février 2014. Mécontents, les syndicats et les ouvriers grévistes se sont de nouveau réunis le 3 janvier dernier dans le parc industriel Canadia, situé en banlieue de Phnom Penh, là où siègent plusieurs usines de confection textile qui fournissent de nombreuses grandes marques internationales. Ils ont été pris pour cible par les forces de l’ordre qui, n’ayant pas réussi à dégager un boulevard bloqué par les manifestants, ont ouvert le feu. Quatre ouvriers au moins ont trouvé la mort, une quarantaine de personnes ont été blessés dont une vingtaine par balle et plus de vingt personnes ont également été arrêtées.
« La situation qui perdure depuis plusieurs semaines est inacceptable. Les militaires ne peuvent pas tirer sur des manifestants pacifiques et les priver du droit de grève», a déclaré Christian Champigny, directeur adjoint du Service des programmes internationaux de Développement et Paix. « Nous ne pouvons que condamner cette nouvelle atteinte aux libertés d’expression et de mobilisation des citoyens cambodgiens. Le gouvernement doit répondre par le dialogue et non par les armes aux revendications des travailleurs et des opposants politiques », a-t il ajouté. La Convention 87 de l’Organisation internationale du travail (OIT) sur la Liberté syndicale et la protection du droit syndical, ratifiée par le Cambodge, précise que « nul ne doit être privé de sa liberté ou faire l’objet de sanctions pénales pour le simple fait d’organiser ou de participer à une grève pacifique. »
Dans la foulée d’une réaction violente face aux ouvriers grévistes, le gouvernement cambodgien a également réprimé les leaders et les manifestants d’opposition venus réclamer la démission du Premier Ministre Hun Sen et l’organisation de nouvelles élections. Le 4 janvier, la police et des personnes en civil ont chassé de Freedom Park, un millier de manifestants de l’opposition à l’aide de matraques. Des femmes et des moines ont été pourchassés et des bâtiments détruits, notamment un temple bouddhiste. « Les autorités ont répondu par la violence aux manifestations pacifiques », a déclaré Naly Pilorge, directrice de la LICADHO, un partenaire de Développement et Paix. « Il semble évident que la protestation des ouvriers a servi de prétexte au gouvernement pour sévir contre les opposants politiques », a-t-elle ajouté.
Le 4 janvier dernier, le gouverneur de Phnom Penh, Pa Socheatvong, a interdit au parti politique CNRP d’organiser toute manifestation dans la capitale « jusqu’au retour à la normale de la situation sur le plan de la sécurité ». « L’interdiction totale et jusqu’à nouvel ordre des manifestations politiques viole la constitution et les Traités internationaux signés par le Cambodge», a déclaré Mme Pilorge. « Le gouvernement doit tolérer l’opposition pacifique et mettre fin au harcèlement que subissent constamment les opposants politiques », a-t-elle souligné.
Développement et Paix est engagé au Cambodge depuis quinze ans et plus récemment auprès des victimes d’éviction forcée et de répression policière et judiciaire.
Vous pouvez lire une déclaration signée par plusieurs de nos partenaires au Cambodge, demandant au gouvernement du Cambodge de respecter les droits des travailleurs dans le pays :